Amis des mots, nous allons réhabiliter la pomme. Il y a quantité de sortes de pommes. D’abord, il y a toutes ces variétés, 20.000 disent certains, de la golden à la granny smith, en passant par la belle de Boskoop, la gala ou la reine des reinettes. Quand on dit "pomme" tout court, aujourd’hui, on pense d’abord à ce "fruit comestible du pommier, à pépins, rond et charnu", comme dit le Larousse.
Mais il y a d’autres pommes… à commencer par la pomme de terre, ou la pomme de pin. Pourquoi ces deux-là s’appellent-elles pommes aussi ? Eh bien il faut fouiller un peu l’histoire de ce mot, qui nous vient du latin, comme souvent. En latin, pomus est l’arbre fruitier en général, pomum désignant tous les fruits comestibles de tous les arbres.
C’est ce qui explique que, par extension, le mot se soit appliqué à ce que l’on a considéré comme le fruit du pin (la pomme de pin) et le fruit de la terre (la pomme de terre). Et tenez, devinez quel a été le premier nom de la banane… Eh oui, au XIIIe siècle, on appelait la banane "pomme de paradis" en référence à ses origines exotiques, tandis que notre grenade était une "pomme grenate", et que ce que nous appelons maintenant une orange tout court s’appelait "pomme d’orange".
D'abord fruit défendu... puis du pommier
Et même, vous vous souvenez sans doute que l’un des douze travaux d’Hercule consiste à dérober les "pommes d’or" du jardin des Hespérides, au nez et à la barbe d’un dragon ? Eh bien ces "pommes d’or", nous apprend Alain Rey dans son Dictionnaire historique de la langue française, désignaient sans doute non des pommes mais des agrumes.
Et un jour, à partir du Ve siècle, "pomme" a cessé de désigner tous les fruits, pour s’appliquer seulement à celui du pommier, d’abord en concurrence avec son nom classique latin, malum. Au XIIIe siècle on se met à employer le mot pomme par "allusion biblique au fruit défendu du paradis terrestre, explique Alain Rey, d’abord avec l’ancien sens général de 'fruit', avant que la tradition populaire ne l’identifie au fruit du pommier", par erreur !
Et si la pomme était en réalité une pèche ou une prune ?
En somme, Adam et Eve n’ont pas croqué la pomme. Ou peut-être pas. Ils ont croqué un fruit non précisé. Ce que l’on sait, c’est que ce n’est pas une fraise ou une groseille. Car pomum, c’est le fruit d’un arbre. Finalement, la pomme n’est devenue le fruit du péché (attention, pas celui du pêcher !) qu’à cause d’une confusion des traducteurs médiévaux de la Bible.
Eh si ! Comme le résume fort clairement Nathalie Gendrot dans son joli livre 150 drôles d’expressions pour cultiver son jardin (aux éditions Le Robert), "Le latin pomum, “fruit d’un arbre”, adopte le sens de “pomme” au Ve siècle mais met du temps à évincer le mot malum, qui [se trouve désigner] à la fois la “pomme” et le “mal” : un hasard de l’étymologie" qui a sans doute contribué à assimiler par méprise le fruit du pommier avec le fruit défendu. Bref, Adam et Eve ont tout aussi bien pu croquer une pêche, une prune ou une cerise. Alors, cessons d’accuser de tous nos maux cette pauvre pomme !
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Divertissement
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